Carte du Japon de 1854 par Dufour. Ezo 蝦夷地 est indiqué au nord du Japon sous la graphie Iesso.Le 8 février 1882, date de l'abolition du bureau de la colonisation d'Ezo 蝦夷地 (Hokkaidô 北海道), le Kaitakushi 開拓使 par le gouvernement de Meiji.

Jusqu'au XIXe siècle, la région d'Ezo regroupait l'ensemble des territoires situés au nord de l'île principale du Japon, Honshû 本州. Elle comprenait l'île d'Hokkaidô, Sakhaline (Karafuto 樺太), les îles Kouriles (Chishima 千島) et le Kamchatka カムチャツカ半島.

La première mention connue d'Ezo sur une carte remonte à 1599 mais le nom est plus ancien. Elle était principalement habitée par les aïnous, ainu アイヌ, peuple indigène. Les Japonais ont commencé à s'y installer à partir du Xe siècle lorsque la famille Abe 安部氏 du nord d'Honshû a établi sa souveraineté au sud d'Hokkaidô. Au cours du bakufu des Tokugawa (1603-1867), le clan Matsumae 松前藩 a établit des liens commerciaux avec les aïnous tout en étendant sa souveraineté sur la région et en réprimant les différentes rébellions aïnous aux XVIIe et XVIIIe siècles.

A partir de la moitié du XVIIIe siècle, plusieurs expéditions russes sont menées au nord du Japon. Elles forcent le shôgunat à placer la région d'Ezo sous son autorité et à formaliser sa frontière avec la Russie par un traité international, le traité de Shimoda 下田, le 7 février 1855, Nichi-Ro washin jôyaku 日露和親条約, qui établit une division des îles Kouriles au nord d'Etorofu et une occupation mixte russo-japonaise de Sakhaline (jusqu'en 1875).

 

Bâtiment principal du bureau de la colonisation d’Ezo, le Kaitakushi 開拓使, 1873 © Bibliothèque de l’université d’Hokkaïdô, Hokudai fuzoku toshokan 北大付属図書館 Le Bureau en charge du développement (kaihatsu 開発) et de la colonisation (takushoku 拓殖) de l'île d'Ezo est créé en août 1869. Le territoire d'Ezo est alors séparé en deux entités : l'île d'Hokkaidô, dont les quatre îles faisant partie de l'archipel des Kouriles, ainsi que la presqu'île de Karafuto (Sakhaline) qui revient à la Russie en échange de la totalité des îles Kouriles après le traité de Saint Pétersbourg de 1875, Karafuto-Chishima kôkan jôyaku 樺太千島交換条約.

Un des premiers directeurs est Kuroda Kiyotaka 黒田清隆 (1840-1900), originaire de Satsuma 薩摩 et futur premier ministre du Japon en 1888.

 

EZO sapporo beer 400Le Kaitakushi emploit de nombreux experts étrangers dont l'américain Horace Capron (1804-1885) spécialiste dans le domaine de l'agriculture, fonde le Collège agricole de Sapporo, Sapporo nô-gakkô 札幌農学校 (de nos jours, l'université d'Hokkaidô 北海道大学), développe de nombreuses industries dont la brasserie Kaitaku, Kaitaku bakushu jôzôsho 開拓使麦酒醸造所 (qui deviendra plus tard Sapporo Beer サッポロビール) et encourage activement une politique de peuplement japonais dans l'île tout en développant les infrastructures routières et ferroviaires. Mais, en contrepartie, le peuple Aïnou se voit privé de ses droits de pêche, de chasse et de propriété foncière.

En 1881, pour assainir ses finances publiques, le gouvernement de Meiji commence à vendre ses biens à des entrepreneurs privés (kan'ei jigyô haraisage 官営事業払下げ) dont ceux d'Hokkaidô. Un scandale éclate sur la vente des biens du Kaitakushi en raison des soupçons de collusion qui pèsent sur l'accord de vente dont le prix trop bas est jugé immoral. Le bureau est définitivement fermé l'année suivante.

Trois préfectures sont créées en 1882 : Hakodate 函館, Sapporo 札幌 et Nemuro 根室 mais elles sont supprimées en 1886 pour ne laisser la place qu'à une seule : Hokkaidô.

 

De nos jours, le Japon et la Russie se disputent encore les îles Kouriles connues sous le nom de « territoires du Nord » ou Hoppô-ryôdo 北方領土. La Russie les occupe depuis leur invasion par l'Union Soviétique en 1945. Les différents gouvernements japonais qui se sont succédés considèrent l'occupation des ces îles comme illégales et en réclament la souveraineté. Le désaccord repose sur les termes du traité de paix de San Francisco entre le Japon et les Alliés, dont l'U.R.S.S. ne faisait pas partie, qui stipulent que l'archipel renonce à toute souveraineté sur les îles Kouriles sans préciser que les quatre îles de Kunashiri 国後島, Etorofu 択捉島, Shikotan 色丹島 et Habomai 歯舞諸島 n'en font pas partie. Les négotiations sont toujours en cours. En raison de ce désaccord, il n'existe toujours pas de traité de paix entre la Russie et le Japon.